Nouvelles formes de régulation et marchés financiers
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• Type de document : Thèse de doctorat
• Nombre de pages : 504
• Format : .Pdf
• Taille du fichier : 4.39 MB
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Extraits et sommaire de ce document
[…] Nous avons pu constater que dans toutes les législations analysées, il est possible de trouver des autorités qui se démarquent de l’administration classique en se rapprochant de la figure du régulateur. Tant les régulateurs que les autorités étatiques en général ont recours, à des degrés variables, aux nouveaux instruments de la régulation. Il est ainsi démontré que ni l’éloignement géographique ni les différences existant entre les systèmes juridiques n’ont empêché l’usage des nouvelles formes de régulation. Le phénomène est donc global, même s’il n’est pas consolidé, car il subsiste de « vieilles habitudes de pensée et des modèles de comportement dépassés ».
Nous avons néanmoins pu percevoir des divergences dans cette consécration. Les pays latino-américains semblent en effet résister à consacrer de véritables régulateurs indépendants des pouvoirs politiques. Concernant l’indépendance à l’égard des pouvoirs privés, on peut dire que la question ne se pose même pas dans ces pays, et c’est logique si on considère que la première problématique, l’indépendance des pouvoirs politiques, n’est pas résolue.
Nous pouvons remarquer que, sauf dans le cas du Mexique, tous les régulateurs ont la personnalité morale, tous sont nommés avec l’intervention des autorités politiques, tous possèdent un cumul des pouvoirs, même s’il y a des différences dans l’ampleur des pouvoirs qui leur sont octroyés. Nous soulignons aussi que le mécanisme choisi par la France pour nommer les membres de l’AMF nous paraît être celui qui assure le mieux l’indépendance de son régulateur à l’égard des pouvoirs politiques, au moins du point de vue de sa composition.
Du point de vue instrumental, les pays latino-américains ont pu nous étonner principalement parce que leur doctrine, leurs juristes n’ont pas encore pris conscience de phénomènes tels que la soft law ou l’autorégulation, même si ceux-ci sont effectivement utilisés, par exemple, par leurs régulateurs. La Colombie fait exception, c’est le seul pays latino-américain qui a repris le terme autorégulation dans sa législation.
Reprenant les mots du Professeur Frison-Roche, « malgré le caractère structurel des hypothèses économiques de défaillances de marchés qui les rend universelles, les réponses ne le sont pas pour autant, les cultures juridiques et politiques nationales continuant de fixer aux régulations des contours et des ambitions diverses »
En ce qui concerne le droit classique, celui-ci continue à être le référentiel. C’est le système juridique au sens classique qui sert de modèle pour l’élaboration et la configuration, voire la dénomination de ces règles privées. L’existence des dénommés codes ou codifications privés en est un exemple, la hiérarchie interne censée exister au sein de chaque corps de règles et dans les techniques d’élaboration des normes en est un autre.
Réactions aux crises. L’analyse des mesures prises après les crises des dernières années nous permet d’observer des mouvements complémentaires : on renforce les outils de répression aux mains de l’AMF (par exemple, en octroyant à l’AMF le pouvoir de restreindre les conditions de négociation des instruments financiers, art. L. 421-16 CMF), en même temps qu’on accroît les garanties de la défense.
Dans ce sens, peuvent être analysées les réformes introduites par la loi de régulation bancaire et financière. Comme cela arrive normalement après les crises, on constate une certaine tendance à réglementer davantage1903. La nouvelle réglementation des agences de notation est l’exemple le plus remarquable, ce qui peut être analysé comme un retrait de l’autorégulation.
En matière de régulateurs, il y a des tendances opposées. On remarque la persistance des nouvelles formes de régulation dans l’augmentation du nombre d’AAI. Ce que n’a pas empêché des critiques à leur égard. Toutefois, même si les régulateurs sont critiqués, le bilan est mitigé parce qu’ils ont vu leurs pouvoirs renforcés, par exemple, le pôle banque-assurance et pour l’AMF, grâce à la loi de séparation et de régulation des activités bancaires.
En matière de régulateurs, on constate en Europe un rapprochement entre la figure du régulateur national et celle du régulateur européen grâce aux pouvoirs qui ont été conférés à ces derniers. Ainsi, les régulateurs européens ne sont plus seulement une nouvelle source de règles, ils ont acquis aussi un pouvoir pour agir en tant qu’administration, à travers par exemple le pouvoir d’agrément des agences de notation.
Cela indique que dans un futur proche il faudra se demander comment on va assurer leur indépendance et leur professionnalité, telles qu’elles sont exigées des régulateurs nationaux. Nous pouvons aisément en conclure que c’est plutôt le côté instrumental des nouvelles formes de régulation qui a été le plus touché par les dernières crises, dans une sorte de repossession de la politique sur l’économie financière, alors que le côté institutionnel en sort renforcé.
À propos des régulateurs, nous pouvons relever le rôle qu’ils ont joué dans l’amélioration de la réglementation, comme l’affirme le Professeur Bonneau : « (…) les autorités administratives indépendantes ne sont en effet pas en reste. Il est vrai que les changements ne sont pas immédiats, car les juges et les autorités administratives indépendantes statuent uniquement à propos d’une affaire. Mais bien souvent, la portée de leur décision va au-delà ». L’auteur cite ainsi la décision de la commission des sanctions rendue dans l’affaire EADS et ses conséquences sur la loi du 22 octobre 2010, ainsi que la décision de l’Autorité de la concurrence rendue à propos de certaines commissions bancaires1909, laquelle « ne va pas rester sans conséquence ».
D’un point de vue plus général, nous constatons des apports réalisés par les nouvelles formes de régulation à l’égard de la gouvernance étatique. À cet égard, nous pouvons évoquer le début de l’application des procédures qui démocratisent la gouvernance telles que la publicité ou les consultations publiques, lesquelles sont mises en oeuvre par l’administration classique, et dont on peut souhaiter la généralisation.
Première partie : La perspective institutionnelle de la régulation
Titre 1 : L’organisation des régulateurs nationaux
Chapitre 1 : Les régulateurs : des entités techniques
Section 1 : L’activité régulée
Section 2 : Des entités professionnelles
Chapitre 2 : Les régulateurs : des entités indépendantes des pouvoirs politiques
Section 1 : La quête d’indépendance
Section 2 : Les difficultés que pose l’indépendance
Titre 2 : Les pouvoirs des régulateurs
Chapitre 1 : Le reproche : le cumul des pouvoirs
Section 1 : Le cumul en cause
Section 2 : Les régulateurs analysés sous le regard du droit classique
Section 3 : Les autres pouvoirs
Chapitre 2 : Les régulateurs et leur quête de légitimité procédurale et structurelle
Section 1 : La juridisation des régulateurs
Section 2 : Les critiques à l’égard des régulateurs
Seconde partie : La perspective instrumentale de la régulation
Titre 1. Les nouvelles sources de l’encadrement normatif
Chapitre 1 : L’implication des acteurs privés dans l’élaboration des normes
Section 1 : Les distinctions conceptuelles autour de l’intervention du privé
Section 2 : Les instruments normatifs incarnant l’intervention du monde privé
Section 3 : L’évaluation de l’intervention du privé
Chapitre 2 : L’internationalisation des sources normatives
Section 1 : La régulation internationale des marchés financiers
Section 2 : La régulation européenne des marchés financiers
Titre 2. L’aménagement des instruments classiques de régulation
Chapitre 1 : La transformation des normes juridiques
Section 1 : Le droit souple et la sanction des normes juridiques
Section 2 : Les modifications relatives aux traits classiques des normes juridiques
Chapitre 2 : Les piliers du droit comme instruments de régulation
Section 1 : Le contrat comme instrument de régulation
§1. Les fonctions du contrat dans la régulation
§2. Contrat
Section 2 : La responsabilité comme instrument de régulation
§1. La dimension rétrospective de la responsabilité et son rôle dans la régulation
§2. La prééminence de la dimension prospective de la responsabilité dans la régulation des marchés financiers
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